La Belgique compte une inscription au patrimoine mondial «naturel ou mixte» au titre d’Etat partie à la reconnaissance des « Forêts primaires et anciennes de hêtres des Carpates et d’autres régions d’Europe ».
En 2007, l’Unesco avait déjà reconnu des hêtraies vierges en Ukraine et en Slovaquie. Ce groupe a été élargi en 2011 pour y inclure les forêts de hêtres allemandes. Depuis 2017, le groupe a été complété par des forêts de hêtres en Albanie, Bulgarie, Italie, Croatie, Autriche, Roumanie, Slovénie, Espagne, Ukraine et les parties les mieux protégées de la forêt de Soignes en Belgique.
La forêt de Soignes actuelle est un massif forestier totalisant un peu moins de 4.500 hectares, le hêtre et le chêne y occupent une place prépondérante. La forêt de Soignes est pratiquement restée intacte jusqu’au 15e siècle. Elle a été consécutivement la propriété des comtes de Louvain et des ducs de Brabant.
Jusqu’au 12e siècle, ces derniers utilisent essentiellement la forêt comme territoire de chasse. A la même époque, des communautés religieuses s’y implantent. La Cambre, Groenendael, Val Duchesse, le Rouge Cloître et le couvent des Capucins deviennent des centres réputés de la vie culturelle et religieuse. Au cours des siècles suivants, la forêt sera malmenée par ses propriétaires successifs (les souverains de l’époque) qui pratiquent des abattages excédentaires et autorisent -contre monnaie sonnante et trébuchante- des pâturages destructeurs de la végétation existante. Les maraudeurs des villages environnants, poussés par le froid et la pauvreté ponctionnent, discrètement et sans aucune autorisation, leur part de bois de construction et de chauffage. Quant aux braconniers, ils foisonnent également et détruisent la faune existante.
Pendant le règne des souverains d’Autriche (de 1714 à 1795), les gestionnaires se rendent compte des dégradations inquiétantes subies par la forêt et décident de replanter un très grand nombre de hêtres qui forment encore aujourd’hui la majestueuse « hêtraie-cathédrale ». A la fin du régime français (de 1795 à 1815), la forêt de Soignes s’étend encore sur plus de 12 000 hectares.
En date du 22 août 1822, sous l’Administration du Royaume des Pays-Bas, peu intéressé par la gestion de la forêt, celle-ci est vendue à « l’Algemene Nederlandse Maatschappij » (=Société générale néerlandaise ») et devient ainsi une propriété privée. Par suite de la révolution belge de 1830 et à la sécession de la Belgique du Royaume néerlandais, la « Société générale néerlandaise » soucieuse de son avenir financier et de sa pérennité, prend la décision de couper les ponts avec les Pays-Bas pour devenir la « Société générale de Belgique ». Au fil du temps, celle-ci vend à de riches investisseurs pas moins de 60 pour cent des parcelles forestières qu’elle possède. Les nouveaux propriétaires défrichent à tour de bras et transforment leurs biens en terrains agricoles, en pâturages ou en biens immobiliers. En quelques années, la superficie de la forêt à diminuée de 2/3 !
En 1842, le risque d’une disparition à brève échéance de la totalité de la forêt devient évident, ce qui émeut à la fois l’opinion publique et le roi Léopold 1er. L’Etat belge propose dès lors à la « Société Générale » le rachat des 4 500 hectares encore aux mains de celle-ci. Le 7 avril 1843, l’affaire est conclue et le domaine forestier encore existant devient propriété de l’Etat belge, la gestion de la forêt étant confiée à l’Administration des Eaux et Forêts. La forêt de Soignes, telle qu’elle est aujourd’hui, est sauvée. Néanmoins, des atteintes importantes à son patrimoine se sont poursuivies dans les décennies suivantes. Des centaines d’hectares ont encore été sacrifiés pour la construction des routes et autoroutes, de la ligne de chemin de fer Bruxelles-Namur, la création du Bois de la Cambre ; sans oublier les projets encouragés par Léopold II tels que l’implantation des hippodromes et champs de course de Boitsfort, Groenendael et de l’Arboretum.
Par suite de la régionalisation de la Belgique, la gestion de la forêt de Soignes est répartie entre les trois régions du pays en fonction des limites communales concernées : soit 56 % pour la Flandre, 38 % pour la Région bruxelloise et 6 % pour la Région wallonne. D’emblée, la volonté commune de ces trois gestionnaires a été la préservation et la revalorisation de la forêt. De fait, la forêt de Soignes a été désignée site Natura 2000 en avril 2016. Depuis le 8 juillet 2017, les réserves forestières intégrales de la forêt de Soignes sont inscrites sur la liste du Patrimoine mondial de l’Unesco. Dans ces réserves, les arbres tombés au sol ne sont plus dégagés et on ne procède plus à aucune coupe, sauf pour assurer la sécurité des promeneurs le long des chemins forestiers.