Du point de vue de l’UNESCO il existe quatre registres statutaires logés dans le domaine Culture :
- Patrimoine Mondial – Naturel
- Patrimoine Mondial – Culture
- Patrimoine Mondial – Mixte (Naturel – Culturel)
- Patrimoine Culturel Immatériel
Ces registres se bornent à lister les patrimoines remarquables au niveau mondial (ENTRIES) et à énoncer les critères qui justifient la sélection au niveau de la classe ‘World’.
Le cinquième « Memory of the World » (qui figure dans le domaine ‘Communication et Information’) est d’une autre nature. Il a comme objectif de mettre l’accent sur l’importance de la communication entre les humains par l’intermédiaire de documents matérialisés sur n’importe quels supports. C’est la raison pour laquelle l’UNESCO-MoW a émis des recommandations aux Etats et Pouvoirs Publics en général pour qu’ils assurent la sélection, la préservation, la représentation, l’accès et les droits … aux documents sélectionnés.
À ce jour, l’UNESCO-MoW se borne à placer sur son REGISTRE les références aux documents physiques (livres, parchemins, bandes magnétiques, disques …) et aux lieux où ils sont conservés. Le contenu de ces documents y sont décrits par quelques termes générique.
Sur cette figure, à gauche figure le Patrimoine Mondial et le Patrimoine Culturel Immatériel logé dans le monde en évidence (« live in evidence »). A droite, le patrimoine documentaire défini comme « des éléments composés de signes et de codes (tel que des écrits) ou de sons et/ou d’images (tels que des enregistrements, photographies ou films), et qui sont (généralement) déplaçables, susceptibles d’être conservés, reproduits ou copiés ». Il est important de noter que cette définition ne se préoccupe pas du ‘signifié’ exprimé au travers de ces signes et codes portés par ces documents. C’est l’humain, au travers d’une expression ou matérialisation analogique, qui est à même de contextualiser les signes et de conférer un sens à ces patrimoines.
Dans les faits, ces 5 registres de l’UNESCO sont fortement liés dans la mesure ou le «patrimoine documentaire» constitue souvent la représentation des “Patrimoines naturels et culturels» ou du « Patrimoine Culturel Immatériel ». Un exemple : le complexe Ateliers-Habitation du Musée Plantin-Moretus figure au Patrimoine Mondial depuis 2005 tandis que les archives de la société «Officina Plantiniana» sont incluses dans le registre « Mémoire du monde » depuis 2001.
Pour cette partie « registres », une sémiotique suffit pour assurer la reconnaissance du patrimoine et de son existence au niveau du monde réel (« live in evidence »). Cela suffit également pour offrir des outils à des moteurs de recherche de type syntaxique ou statistique et obtenir des résultats de qualité variables, non navigables comme représentation structurée de connaissances.
Cependant, au travers du Programme « Memory of the World), l’UNESCO cherche à promouvoir l’aspect « COMMUNICATION » entre les humains d’aujourd’hui, de demain, d’ici et d’ailleurs, de contextes socio‑politico‑économico‑culturels différents. Pour cela, il faut activer toutes les ressources de l’ÉPISTÉMOLOGIE (c’est‑à‑dire les façons de représenter le réel via unecombinaison de sémiotique et de sémantique).
Dans les faits, il s’agit de produire un effort technologique non négligeable. La communication est un processus par lequel les organismes vivants définissent et partagent de la signification. Ce processus exige que l’expéditeur et le destinataire partagent un univers linguistique et sémiotique commun (un système de signes véhiculant à la fois la représentation (signifiant) et la signification (signifié). De plus les six fonctions du langage, définies dans modèle de Roman Jakobson (expressive, conative, phatique, métalinguistique, référentielle, poétique), se complètent par une septième que l’informatique rend possible, à savoir la fonction performative où le langage a pouvoir d’action.
La révolution numérique ne modifie en rien les deux Patrimoines (Mondial et Culturel Immatériel). Du fait de la normalisation par le codage numérique, c’est l’ensemble des représentations (textes, photos, audio, vidéo) qui sont désormais manipulable sous la forme de données par l’ordinateur dans un environnement homogène! Cette mutation accroît considérablement les capacités de création (authoring) et d’interaction de l’humain via l’interface..
Pour modéliser et représenter les documents, afin qu’ils puissent interopérable à l’échelle du monde, dans le temps et dans l’espace, il faut assurer que les représentations numériques soient interopérables suivant quatre axes : persistance, systémique, historique, culturelle :
- Temporelle : un même signifié spécifique peut être représenté de manière évolutive avec les changements des technologies de l’information et de sa communication. C’est le cas en particulier de la gestion des archives ou de la migration de technologie dans une organisation. L’interopérabilité temporelle est la ‘PERSISTENCE’
- Systémique : une œuvre et son contexte peuvent être transmis entre deux systèmes d’information sans perte de signifié, bien que les systèmes utilisent des technologies différentes. Quand l’interopérabilité temporelle est assurée par construction, l’interopérabilité systémique est aussi assurée. “The ability of a technology & organizational system to ensure to the citizen of here that the citizen of there will be capable of enjoying the local cultural, sociological, economic… assets” [Abdelaziz Habib (Memory of the World) UNESCO].
- Historique : au départ d’une œuvre dans son contexte, des auteurs peuvent vouloir la faire évoluer ou en dériver d’autres œuvres et ce sans perdre l’historique. La persistance de l’histoire des choses est aussi à assurer par construction
- Culturelle : une œuvre et son contexte peuvent être exprimés suivant divers modes dépendant des contextes culturels ou sociaux, en particulier la langue. Mais, la traçabilité permet aussi de présenter les liens entre des œuvres, leurs filiations et leurs contextes.
Ces techniques de représentation sont aussi très pertinentes pour les quatre patrimoines (ENTRIES) du World Heritage. Pour matérialiser un sujet du ‘patrimoine culturel immatériel’ (qui est évanescent par nature) il faut enregistrer des représentations (texte, photo, audio, vidéo, ..) ! Ces derniers sont des documents au sens «Memory of the World» et sont donc représentables comme des échantillons de manière interopérable.
Le saut qualitatif est hautement appréciable, l’univers informatique interopérable (construit sur une base sémantique) offre aux utilisateurs des moteurs de navigation dans des arbres de connaissances (graphes) avec des résultats de très haute qualité. Une combinaison syntaxique-statistique-sémantique ouvre la porte à de nombreuses applications dans le domaine de la culture et de l’enseignement.
La place dans l’histoire d’un discours (Martin Luther King sur les marches du Lincoln Center à Washington) ne peut se comprendre qu’en le reliant à son contexte, à la présentation de l’évènement dans lequel il a été prononcé, aux évènements qui lui sont associés, aux articles dans les journaux, aux réactions sociopolitiques, à pouvoir écouter ce discours tel qu’il a été prononcé, à la capacité d’accéder à sa transcription (y compris en braille) et à sa traduction dans de nombreuses langues. L’interopérabilité culturelle implique l’intégration de la gestion des choses avec la gestion des contextes.
Dans le cadre du Comité BE MoW, des experts sont disposés à vous aider dans vos démarches via la mise à disposition de documents (FR/UK) ou l’organisation d’un atelier de formations aux concepts de base.